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Toutes les présentations des églises ont été écrites pour le journal du Doyenné Tardoire et Bandiat, entre octobre 2001 et août 2005, par Monsieur Sylvain Deschamps.


L’église Saint Martin de Marthon

Chevet de l'église de Marthon

Saint Martin : Bravo ! Juste à l’heure !
Le Chroniqueur : Comme promis !
L’Église : Vous vous étiez donnés rendez-vous ? !
Saint Martin : Eh oui ! Nous avions pris date, lors du dernier pèlerinage du Doyenné, et devions nous retrouver au lendemain de l’inauguration de l’exposition des émaux de Ligugé à Montbron ; et le rendez-vous était ici, Le Chroniqueur : à Marthon, pour parler de vous, l’Église, la belle endormie...
Saint Martin : Cher Chroniqueur, vous allez donc « traiter » ce monument qui m’est dédié. Et comme j’ai un peu de temps (j’ai rendez-vous à Chazelles, et c’est à deux pas), je reste auprès de vous. J’aimerais que vous parliez beaucoup de l’Église, et très peu de Saint Martin. On m’a beaucoup évoqué ces derniers temps...
Le Chroniqueur : Dont acte !
Mille ans ! Mille ans déjà que vous fûtes construite ! On retrouve trace d’un prêtre en ces lieux en 1050. A cette époque, vous dépendiez de Saint Yriex La Perche. Et voilà ce qui est écrit pour vous décrire :
L’Église mesure 25m,70 de longueur et 8,05 m de large dans la nef. Elle comprend une nef, un transept et un choeur à chevet plat déjeté au nord (Ici, le mot déjeté n’a aucun sens péjoratif). La nef du XIème siècle est couverte d’un berceau en bois. Elle est à 3 travées, avec doubleaux sur colonnes dont les dosserets reçoivent des arcades aveugles latérales. Deux autres travées devaient la prolonger à l’Ouest et à l’Est. Dans la première travée, au midi, on trouve la porte à trois voussures et cordon, mais les colonnettes ont disparu. Les deux autres travées ont une fenêtre de chaque côté, encadrée par des colonnettes à l’intérieur. Les croisillons, très remaniés, portent un berceau brisé ; les absidioles, carrées intérieurement, étaient en demi cercle, comme l’est au dehors celle du Sud. La coupole, sur pendentifs insérés entre les grands arcs à deux rouleaux, ayant des départs distincts et non gauchis est portée par des piliers puissants de 2 mètres environ. Le choeur, refait, est voûté d’un berceau avec doubleau sur le mur du fond, et percé d’une large fenêtre sur ses trois côtés, celle de l’Est réduite à une rose.
Façade de l'église de Marthon Le mur Ouest, sans ouverture au rez de chaussée, est épaulé par trois contreforts en glacis, celui du milieu arrêté sous le premier étage, les autres montant jusqu’à la base du pignon ; entre eux, deux arcades aveugles, à un rouleau, entourées d’un cordon et portées par des colonnettes, en encadrent une troisième, semblable, percée d’une fenêtre. Le pignon, qui part d’un cordon mouluré, est orné de deux arcades semblables, entre lesquelles s’élève, jusqu’au sommet, une demi colonne appuyée sur une console. Les murs de la nef sont renforcés de contreforts, entre lesquels sont insérés de grands arcs de décharge ; des enfeus y sont ménagés. Le choeur, surhaussé, a conservé les modillons de sa corniche. Le clocher carré, au dessus de la coupole, avec angles rentrants, a trois étages décorés : l’un de deux groupes d’arcs aveugles brisés sur consoles, que sépare une colonne avec chapiteau ; le deuxième, au dessus d’un cordon, de deux baies jumelles, aux arêtes en boudin, percées dans un rouleau au cintre brisé, dont l’imposte se prolonge en cordon horizontal. Le troisième, encore sur un cordon, n’a que deux ouvertures sans linteau. Il est surmonté d’un toit assez élevé, à quatre pans. Ce clocher ne remonte pas au delà de la fin du 12ème siècle.
Saint Martin : Tout cela est bel et bon ; et fort intéressant... Mais cela ressemble beaucoup au texte de Jean George dans la partie Charente des Églises de France ?
Le Chroniqueur : C’est vrai, et je vais vous faire un peu plus personnel ! en extrayant, présentant et commentant les traits particuliers qui, cette fois ci dans « Les Églises romanes de l’Ancien diocèse d’Angoulême » illustrent notre belle église.
Elle est une des premières à avoir été construite en « appareil moyen bien dressé ». Avant c’était du « petit appareil ».
Les colonnes sur dosseret sont réservées à Marthon et à Saint Genis.
La face du support, du côté de la nef n’est renforcée par un contrefort qu’à Marthon et Rivières.
Il n’y a que quelques églises, dont Marthon, à avoir des arcades aveugles.


Arcades aveugles de l'église de Marthon Ce n’est qu’à Marthon (et à Saint Sauveur) que des pendentifs viennent s’insérer dans l’angle des grands arcs. Votre clocher est reconnu comme un des plus beaux du département.
On trouve un tombeau en saillie à l’extérieur, ce qui est rare.
Enfin, un record ! Parmi les églises dont les axes présentent une brisure, comme l’Isle d’Espagnac, Saint Amand de Boixe et Saint Cybardeaux, cette brisure est à Marthon de 15°. Cette déformation peut être accidentelle, ou intentionnelle... Mais quelle intention ? Le « droit de réserve » de l’église lui interdit de répondre...
Saint Martin : C’est déjà nettement mieux ! Mais vous nous avez habitué à un ton plus personnel, plus intimiste...
Le Chroniqueur : Puisque vous le voulez, vous l’aurez ! Et même pas pour une moitié de manteau !
D’abord, une approche personnelle de notre belle église.
Sur la place il faut aller se mettre à l’ombre du noyer, adossé au muret de la propriété, près des pigeons qui roucoulent. S’il est vrai que Saint Louis rendait la justice sous un chêne, le roi Pausole sous un cerisier, pourquoi le fidèle ne rendrait il pas hommage à l’Église sous un noyer ? A l’époque, du reste, pourquoi ne pas croquer quelques cuisses de noix...
Saint Martin : Avec un verre d’Alsace du café d’à côté ! Il est excellent, avec un bouquet de glycine...
Le Chroniqueur : Si c’est vous qui le dites !
Intérieur de l'église de Marthon En fait, c’est un très bon poste, pour une vue panoramique, de gauche à droite. La belle bâtisse de l’auberge tout d’abord, avec sa grange qui fait penser aux anciennes écuries, et son aspect sérieux, France profonde qui fait songer aux repas de baptêmes, mariages, communions... Puis la percée sur le pont du Bandiat, qui conduit à la ville, puisqu’à l’origine l’église était une église de faubourg. Puis la perspective du donjon, redoutable et rassurant à la fois, bâti sur la chapelle Saint Jean, symbole de l’importance de l’ancienne baronnie de Marthon... Et puis l’église, dense, bien plantée, rassurante elle aussi. Et surtout cela donne une impression d’éternité, que l’église a toujours été là, que rien ne change et que c’est bien ainsi... paisible...
Pour entrer dans l’église , il faut prendre... la rue du Stade ! Il faut regretter que bien peu de jeunes fouteux ou rugbymen ne s’arrêtent pour visiter (au moins...) A l’intérieur, ce qui frappe le plus, c’est effectivement la façon dont l’église est déjetée au Nord. On pense presque à un décor de théâtre comme si le prêtre allait faire un détour, côté cour ou côté jardin.
L’élévation est très pure, la coupole imposante, le dallage ancien... On a enlevé le chemin de croix qui, reconnaissons le ne correspondait pas du tout, par ses dimensions et son dessin, à la sobriété romane. On croit savoir, de bonne source, que l’arrivée d’un nouveau chemin de croix est imminente...
Vitrail circulaire de l'église de Marthon Au fond du choeur, un très beau vitrail circulaire, avec des visages de Saints tout autour à reconnaître et au centre Jésus, le Sacré Cœur, Sainte Marie Alacoque et le souvenir de Paray le Monial.
Évidemment, pas de mobilier, ni de statues, ni oeuvres d’art qui détourneraient l’attention. Mais, mais... Dès l’entrée, tournez à droite et asseyez vous. Devant vous à la hauteur du premier étage et dans le contrefort Nord, une ouverture, une niche plutôt, d’un dessin très élégant et qui reçoit très bien l’éclairage électrique. Cela donne une luminosité à la fois claire et diffuse, qui attire l’esprit avant d’élever l’âme... dans les bons jours !... et c’est le moment de prier... et de prier aussi, et surtout, pour l’église elle même...
Saint Martin : Voilà une bonne pensée, et qui vous honore !
Le Chroniqueur : Ne vous moquez pas, Cher Saint Martin, et maintenant parlons un peu de vous !
Saint Martin : Ah non ! Gardez moi pour une autre fois, quand vos lecteurs m’auront un peu oublié. Restons sur l’austérité de notre église, si petite qu’elle soit elle rejoint la grande Église qui inspire le grand Bossuet : « Étrangère que rien n’attache, que rien ne contente, qui regarde tout en passant sans jamais vouloir s’arrêter ; heureuse néanmoins dans cet état, tant à cause des consolations qu’elle reçoit durant le voyage, qu’à cause du glorieux et immuable repos qui sera la fin de la course. Voilà l’image de l’Église pendant qu’elle voyage sur terre ».
Le Chroniqueur : Alors, taisons-nous ! Mais, pour avoir le dernier mot, je citerai encore Bossuet : « La sagesse humaine apprend beaucoup, si elle apprend à se taire ».

Sylvain DESCHAMPS

En dehors des livres cités plus haut, ce texte doit beaucoup aux articles écrits et publiés par Mme Fils Dumas-Delage, dans les revues « Autour d’Écuras ». Qu’elle en soit sincèrement remerciée.


Carte de la paroisse Saint Augustin en Tardoire et Bandiat

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