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Toutes les présentations des églises ont été écrites pour le journal du Doyenné entre octobre 2001 et août 2005 par Monsieur Sylvain Deschamps

L’ÉGLISE SAINT PIERRE de VILHONNEUR.

vitrail de St pierre dans l'église de Vilhonneur

L’Église : Doux Jésus ! Vous avez l’air fourbu, mon bon Saint Pierre ! Entrez vite vous mettre au frais !
Saint Pierre : Eh oui ! Je suis un peu essoufflé ! Il faut dire que, partant de Rancogne (où je suis un peu chez moi...), j’ai voulu, pour vous rejoindre, prendre le Sentier des Moulins, de La Forge à Rochebertier. C’est une belle promenade.., mais je n’ai plus vingt ans ! Il y a tout de même 1939 ans que je suis immortel... Et dire que tout à l’heure je dois rejoindre Saint Paul à Saint Paul ! Et je vais le trouver en pleine forme, Lui !.. Il faut dire qu’il a l’habitude des longues marches, Lui !.. Et vous, cher chroniqueur, comment êtes vous venu ?
Le Chroniqueur : Paresseusement, en voiture... Mais, à ma décharge, en roulant doucement sur la D109, et sur un kilomètre à peine, de la Grand’Route Angoulême Montbron en direction de Saint Sornin, je collectionne les petits bonheurs visuels... autour de la Cité de la Pierre... le logis de la Robinière, la Grange aux Dîmes, le Château, le Gué romain, le Belvédère de la Carrière qui ressemble à un théâtre antique, l’alignement des colossaux blocs de pierre (en calcaire jurassique au grain très fin), le Moulin de la Pierre, le logis de Rochebertier, etc. et surtout vous, l’Église, construction de Pierres au milieu d’autres Pierres.
Saint Pierre : C’est vrai. Je suis à mon aise, ici... Tout y tourne autour de la pierre, et souvent de la pierre romaine. Je ne garde tout de même pas un très bon souvenir de ces Romains ! Et même le Maire, ici, a un nom de romain !
Le Chroniqueur : Allons, Allons... Il y a prescription !.
Saint Pierre : Vous avez raison. Parlez nous plutôt de notre hôtesse. Nous reviendrons plus tard à l’environnement. Allez y ex professo (en homme qui possède parfaitement son sujet).
Le Chroniqueur : Fiat voluntas tua ! (que votre volonté soit faite).
La première mention manuscrite de Vilhonneur apparaît dans le cartulaire d’Obazine en Limousin, vers 1150, à la faveur d’une dotation faite par Lendric, vraisemblablement seigneur du lieu et de ses trois fils, Ithier, Guillaume et Siméon à l’abbaye, sous le règne de Louis VII le Jeune, Hugues étant évêque d’Angoulême. Le donateur figure dans l’acte sous le nom de « Landricus de Vilaonor ». C’est donc à cette deuxième moitié du XIIème siècle que remonte l’église. Il faut dire, pour simplifier, qu’ici à Vilhonneur, ce sont surtout les guerres franco-anglaises qui ont détruit, ou mutilé, une bonne partie de l’église d’origine dont il reste au moins une très belle nef, très imposante.
Arrière de l'église de Vilhonneur De son plan initial, dont nous ne savons rien, ne demeure que cette nef. Elle est de forme rectangulaire et ses trois travées sont délimitées par des colonnes sur dosserets, avec des piliers, à l’ouest, qui viennent recevoir les arcades appliquées sur les murs, et le départ des arcs doubleaux qui, primitivement, soutenaient une voûte en berceau effondrée voici des siècles.
L’actuelle voûte est dite de brique par Jean George en 1933, alors que l’abbé Michon, au cours du 19ème siècle l’avait décrite : « cintrée en lambris avec les poutres transversales travaillées et amincies, seul exemple de ce genre ». Cette voûte de brique actuellement en place vint donc remplacer cette remarquable voûte de bois voici environ un siècle.
Le bel appareil régulier de la nef contraste avec celui du mur pignon de l’ouest ainsi que celui du choeur et du clocher. Des traces d’incendie très nettes ont altéré les murs de la nef, tandis que le mur pignon et le choeur furent hâtivement remontés, à l’aide d’un appareil très disparate. Avec la disparition de la voûte d’origine, nous pensons être là face aux traces des ravages des guerres anglaises.
La façade originelle de l’église romane a été totalement détruite pour être remplacée par un mur pignon aveugle, sis à l’ouest, et reconstruit dans la plus grande hâte. Au cours de cette reconstruction, la nef, vraisemblablement mutilée, en fut visiblement raccourcie.
Une petite porte de style roman tardif a alors été ouverte à l’extrémité nord-ouest de la nef centrale préservée. Cette porte correspond à la troisième travée de la nef.
Intérieur de l'église de Vilhonneur La nef est éclairée par de hautes et étroites fenêtres romanes, ressemblant presque à des meurtrières, vues de l’extérieur, et comportant des embrasures fort évasées à l’intérieur : une par travée, soit deux de chaque côté de la nef.
Au choeur d’origine, dont nous ignorons le plan autant que l’importance, a succédé un modeste sanctuaire carré, dont l’appareil de récupération, assemblé à la hâte, parle de reconstruction. Cependant, si reconstruction il y eut, il faut la situer avant la fin du 13ème siècle. Cette assertion nous est permise par la présence d’un intéressant gisant ; autrefois placé contre le chevet de ce choeur, et datable de la seconde partie du 13ème siècle précisément. J’en reparlerai plus loin. Ce choeur, reconstruit en prolongement de la nef, est plus étroit que celle-ci.
Édifié à l’est, ce modeste choeur est surmonté d’un massif clocher-tour, épousant exactement à sa base les dimensions extérieures du choeur. Ce clocher, assez fruste, est ouvert de larges baies sans linteau et ne possède qu’une petite porte d’accès, située extérieurement à plus de trois mètres du sol. Ces éléments sont défensifs, tandis que l’examen de l’appareil disparate du clocher nous parle lui aussi de reconstruction au cours des guerres anglaises.


Entrée de l'église de Vilhonneur Les murs extérieurs de la nef sont renforcés de deux grands arcs aveugles, au centre desquels s’ouvrent les étroites fenêtres romanes. Quatre hauts contreforts plats rythment ces deux murs de la nef, bien typiques d’un roman tardif. L’exhaussement de la corniche date du 19ème siècle, ainsi que la sacristie accolée à la base du clocher.
Revenons à la porte d’entrée latérale ouverte au nord-ouest de ce qui restait d’une nef à l’origine certainement plus longue qu’elle ne l’est actuellement. Cette porte date du 13ème siècle ou du tout début du 14ème. Elle a conservé trois épaisses voussures, dont la première s’orne d’un cordon à tête de clou, et qui reçoivent les tailloirs prolongés sous lesquels se dressent,de chaque côté de la porte, deux colonnes aux chapiteaux simples, qui furent pratiquement tous l’objet d’une restauration contemporaine.
Les chapiteaux de ces colonnes sont ornés chacun de quatre petits crochets sculptés à leur sommet, et dans lesquels s’annonce le gothique. Jean George parle de « chapiteaux en accordéon » et il estime ce décor dérivé de celui des « feuilles d’eau ». Intérieurement, pour autant qu’on puisse en juger malgré les mutilations d’un très lointain incendie, le décor des chapiteaux des hautes colonnes pourrait être le même.
Pour ce qui est du mobilier de l’église, mieux vaut n’en pas parler car il a visiblement été l’objet d’un nettoyage actif par le vide. Plus d’autels, ni de chaire, ni de chemin de croix, ni presque de statues, plus trace du moindre ornement sacré. Tout le sol du sanctuaire a été recouvert soit de carrelage soit de dalles neuves.
On peut penser que l’actuelle église Saint-Pierre de Vilhonneur n’est pas le vestige d’un édifice plus ancien, plus important et infiniment plus soigné, vraisemblablement dévasté pendant les premiers affrontements des guerres anglaises.
Et maintenant, la Cloche : Le 13 mai 1850, le maire Jean Blanchard, lors d’une réunion du conseil municipal, décide de prélever sur les fonds de la commune la somme de cent quatre vingt francs pour payer le sainctier qui a fondu la nouvelle cloche de Vilhonneur. Cet artisan était venu travailler à La Rochefoucauld et à Rancogne. Ce fondeur de cloches avait passé contrat l’année précédente avec le maire de Vilhonneur. Il s’appelait Nicolas Forgeot et demeurait à Maisoncelles (Haute Marne).
Par ce contrat, le sainctier s’engageait à porter le poids de la cloche à cent quarante six kg et il garantissait son travail pour la durée d’un an. La nouvelle cloche de Vilhonneur fut bénite par Philippe Prévost du Las, curé-archiprêtre de Ruffec. Pour parrain, elle reçut Pierre Dutartre-Boijoly, conseiller municipal, et pour marraine, Marie Jeanne de Corgnol, héritière de Rochebertier, épouse de Pierre Perrot, autre conseiller municipal.
Saint Pierre : Hoc erat in votis (voilà ce que je désirais). Mais si vous ajoutiez une petite note personnelle ?
Le chroniqueur : Je dirais que j’aime beaucoup Vilhonneur, pour le souvenir de son gisant au cœur de son église, et pour son église au cœur du village... Cette simple plaque attestant l’emplacement du gisant du chevalier de Chambes à côté de l’église est émouvante car elle atteste de la fusion quasi charnelle du Seigneur du château mort en 1256 et ici enterré et de l’amour de son fief. D’autre part c’est une belle famille que les DE CHAMBES avec leur lignage romanesque puisque cette descendance nous donne, pêle mêle, la branche des barons et comtes de Montsoreau avec un de Chambes mort à Poitiers en 1356 et un prolongement avec les Montsoreau de Touraine et toutes les histoires de la petite histoire, et Françoise de Maridor, maîtresse de Bussy, massacrée par Charles de Chambes pour le plus grand bonheur d’Alexandre Dumas et sa « Dame de Montsoreau... »
Et puis, il y a deux approches de l’église :
- Si vous voulez prier, ou simplement vous recueillir, il faut venir par un petit matin d’hiver, avec un soleil ras qui filtre par le cinabre orangé du vitrail du chevet. La pierre est froide, mais belle ; les murs sont nus, mais majestueux.
- Si vous prenez l’église comme monument, venez n’importe quand !
Elle est toujours au centre d’un monde de 2000 ans d’histoire, et même beaucoup plus si l’on remonte à la préhistoire omniprésente.
Que de temps parcouru de la grotte du Placard à Rocamat !... Et la voie romaine vers Limoges au gué du Peyrat, Et l’église du 12ème siècle, Et les guerres avec l’Angleterre avec le repaire de Rochebertier et le château du 15ème, et le « Logis » du 16ème et les maisons plus récentes de la Grange aux Dîmes et du logis de la Robinière. Finalement, cela donne le vertige !...
Saint Pierre : Allons, remettez vous, cher chroniqueur ! Quel enthousiasme !
Le Chroniqueur : J’en ai en réserve ; et vous le prouverai bientôt dans une autre de vos églises. Peut être à Feuillade ? C’est très beau Feuillade...
Saint Pierre : A bientôt donc ! Je transmets votre bonjour à Saint Paul...

Sylvain Deschamps




Carte de la paroisse Saint Augustin en Tardoire et Bandiat

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