LES ÉGLISES SAINT VIVIEN D’YVRAC
et SAINT JEAN BAPTISTE de MALLEYRAND
La scène se passe par un bel après midi de Septembre, devant l’église de Malleyrand, parce qu’ici comme à Montbron « l’été finit sous les tilleuls ».(1)
Saint Vivien et Saint Jean Baptiste sont assis sur le petit muret du nord, alors que l’église ou « chapelle des Templiers » rejoint son amie d’Yvrac et lui fait visiter son intérieur à la recherche des rares et derniers aménagements
Saint Vivien : Mais, n’avions nous pas rendez vous avec le Chroniqueur ?
Saint Jean Baptiste : Si fait. Mais il m’a prévenu, le 31 Août à Sauvagnac, qu’il serait sans doute en retard. Il participe, près d’ici, dans la forêt de Quatre Vaux à la partie habituelle de Belle Venette avec Saint Martial et Saint Rémy (2). En attendant, profitons du paysage.
Saint Vivien : C’est vrai que pour vous visiter, et donc apprécier ce panorama, on peut vous retrouver à mi pente du vallon, soit en partant de Marillac par la D395 et un « routinou » plus loin à gauche, et l’église vous domine, soit en venant de Lidrac par la D62 et dès l’entrée du bourg, c’est vous qui dominez l’église sur la gauche. Et tout autour de vous ces pâturages et ces belles limousines...
Saint Jean Baptiste : avec un sourire... Et dire que peu avant Mardi Gras, je serai en Gironde, à Bazas, chez moi, pour la fête du bœuf gras. Et là bas, leur robe est de couleur grise, plus ou moins foncée. Dieu, que la nature est belle... Mais voici venir notre chroniqueur.
Le Chroniqueur : Bonjour, chers Saints Patrons ! Je vous transmets le bon souvenir de Saint Martial et Saint Rémy qui auraient bien voulu m’accompagner mais qui sont, comme vous, très occupés. Mais ils vous renouvellent, bien sur, leur invitation.
Saint Jean Baptiste et Saint Vivien : Nous verrons cela... là haut !
Le Chroniqueur : Excusez moi !
Cher Saint Vivien, j’arrive donc de votre église et j’aurais voulu préparer pour nos lecteurs une présentation historico-touristique du bâtiment. Mais les travaux en cours à l’extérieur, sans préjuger de restaurations intérieures, ne me permettent guère que le résumé suivant :
« L’église est un bâtiment très simple que l’on peut dater de la fin du 12ème siècle. Il faudrait, et on va le faire, reprendre les murs et la façade pour mieux apprécier la qualité de la pierre. La nef est couverte d’un plafond en bois aux bords arrondis. Des pilastres très saillants, avec colonnes aux chapiteaux sculptés et bases pourvues de griffes, reçoivent un grand arc, à peu près plein cintre, qui la sépare du faux carré. Celui ci est couvert d’une coupole, sur trompes, petites et surmontées de trois corbeaux recevant le cordon sur lequel repose la calotte, à base d’un octogone irrégulier. Le grand arc oriental est porté de même, mais ses chapiteaux sont galbés, ainsi que ceux des colonnes de l’abside circulaire et sous cul de four, qui reçoivent une arcature et partent d’un banc. Le clocher, sur le carré, a les côtés de sa souche pourvus d’une arcade aveugle, brisée et bandée entre les deux gros contreforts d’angle. Une baie, en plein cintre est ouverte sur les côtés de son étage ; un toit bas, à quatre pans, le couvre » . (3)
Pour ce qui est de l’histoire de l’église, il faut, si l’on veut en savoir plus, se plonger dans les très intéressantes études de Jean Luc Augustin (voir la revue Études Locales N°10). Il en ressort que les grandes heures de l’église remontent :
- au 18ème siècle, qui a été entièrement « couvert » par trois prêtres seulement.
- à 1803, l’année de la fusion « officielle » des paroisses d’Yvrac et de Malleyrand.
- au 19ème siècle où l’opinion publique suivra fidèlement l’évolution politique en célébrant le « Triomphe de la Liberté » en 1831 après avoir célébré une messe d’actions de grâce en 1820 à l’occasion de la naissance du duc de Bordeaux ! En fait, on suivait l’air du temps... et tout cela sous votre œil indulgent, cher Saint Vivien !
Saint Jean Baptiste : Au fait, Cher Chroniqueur, parlez nous donc un peu de notre ami, qui se cache derrière un tilleul, tout ému de son entrée au Club !
Le Chroniqueur : Cher Saint Vivien, la modestie des renseignements vous concernant n’a d’égale que la minceur des documents concernant l’église. Et comme il ne faut pas compter sur vous (devoir de réserve oblige) pour nous en dire plus... Votre vie, racontée par Grégoire de Tours, vous présente comme l’évêque de Saintes au 5ème siècle, et il ressort de cette vie deux actions principales.
- Vous avez fait face à une invasion de Saxons et, par la suite, vous avez fait réédifier la cathédrale qui vous fut ensuite dédiée.
- Et surtout vous avez fait quelque chose qui vous rend populaire à tous et dans tous les temps :
Vous vous êtes déplacé à Toulouse pour obtenir du roi aryen Théodoric une diminution des impôts. Vous voilà populaire pour la nuit des temps ! Cette présentation humoristique sous entend quelque chose de plus sérieux : c’est le rôle de l’Évêque, dans sa Cité et dans le Haut Moyen Âge. Sujet passionnant que l’on pourrait étudier longuement ; mais ce n’est pas notre but aujourd’hui.
Maintenant, cher Jean Baptiste, à vous et à Malleyrand.
Saint Jean Baptiste : Ah non ! Vous n’allez pas parler de moi ! Vous m’avez suffisamment traité à l’occasion de Sauvagnac !
Le Chroniqueur : Tout à fait d’accord ! Je profiterai de cette place que vous m’accordez pour parler plus longuement de notre église mais aussi de la chapelle des Templiers (c’est la même), les Pauvres Chevaliers du Christ (ce sont les mêmes), de l’amalgame que l’on fait entre Godefroy de Bouillon, Beaudouin II et Hugues de Payens, quand ce n’est pas avec Jacques de Molay, les Hospitaliers, les chevaliers de Malte, etc..
Résumons : En 1099, les Croisés de Godefroy de Bouillon prennent Jérusalem. Reste à défendre ce poste avancé de la chrétienté. En 1118, neuf chevaliers Francs, groupés autour de Hugues de Payens et de Geoffroy de Saint Omer décident de consacrer leur vie à la cause des pèlerins de Terre Sainte. Ils prennent d’abord le nom de « Pauvres Chevaliers du Christ », (on les appellera aussi la Milice du Christ), puis, après que Beaudouin II leur a donné pour résidence une salle de son palais de l’esplanade du Temple, ils deviennent les Chevaliers du Temple : les Templiers.
En Orient, les Templiers forment l’avant garde des armées chrétiennes, aux côtés des Hospitaliers. En Occident ils deviendront, à l’occasion, de grands propriétaires terriens. Nous n’avons pas à juger ici du bien fondé de ce qu’on leur reprocha ensuite. Toujours est il qu’au début du 14ème siècle, une lutte de géants opposa Philippe le Bel et Guillaume de Nogaret au maître des Templiers Jacques de Molay sous le regard fuyant du pape Clément V. On connaît la suite... C’est l’un des innombrables et passionnants romans du Roman de l’Histoire de France. Mais ici, à Malleyrand, nous ne voulons retenir que cette présentation de Saint Bernard de Clairvaux :
« Les Templiers vivent sans avoir rien
en propre, pas même leur volonté.
Vêtus simplement et couverts de poussière,
ils ont le visage brûlé des ardeurs du soleil,
le regard fier et sévère : à l’approche du combat,
ils s’arment de foi au-dedans et de fer au-dehors ;
leurs armes sont leur unique parure ;
ils s’en servent avec courage dans les plus grands
des périls, sans craindre le nombre,
ni la force des Barbares : toute leur confiance
est dans le Dieu des armées ; et en combattant
pour Sa Cause, ils cherchent une victoire
certaine ou une mort sainte et honorable.
O l’heureux genre de vie, dans lequel
on peut attendre la mort sans crainte,
la désirer avec joie,
et la recevoir avec assurance ! »
Maintenant, pour ce qui est de la « vérité-vraie » des Templiers ; il nous faudra attendre que le Bon Dieu nous accueille là haut et nous ouvre ses dossiers. Rêvons donc aux « Archives du Bon Dieu » !
Toujours est il qu’à cette époque notre pays, entre autres, se couvrit de Commanderies : sorte de prieuré, ayant appartenu à un ordre à la fois religieux et militaire ou hospitalier. Dans la trentaine de commanderies de Charente, nous en trouvons deux Templières dans notre doyenné : Vouthon, où nous irons bientôt retrouver notre grand Saint Martin et Malleyrand, ici même, dont seule notre belle église subsiste.
Du reste, comme nos églises hôtesses sortent du bâtiment, nous allons pouvoir visiter.
Les églises hôtesses : Nous vous laissons la place...
Les Saints : Que pensez vous de votre entretien ?
Les églises hôtesses : oh ! c’est très convenable pour l’essentiel. Mais on voit bien qu’on manque un peu de personnel. Pourtant c’est noble de s’occuper d’une église et, d’autre part, « les tâches ménagères ne sont pas sans noblesse ! » (4)
Les autres : ! ! ? ?
.
Le Chroniqueur : Reprenons. C’est une église qui sent bon l’authenticité, le VRAI. On s’en rend compte en en faisant le tour. On voit bien qu’elle a souffert d’un coup de foudre sur l’arrière (assez grossièrement retapé), qu’elle penchait un peu sur l’avant gauche (d’où ce contrefort important) mais elle est bien là depuis la fin du 12ème siècle, pratiquement intacte et surtout jamais remaniée. C’est un de ces fameux lieux où souffle l’esprit. On peut rêver à ces formidables guerriers, au lourd galop des chevaux, à la grande croix déployée et tout cela pour la plus grande gloire de Dieu.
Qui plus est.. bien que respectant les proportions habituelles de construction, l’église n’est pas austère, avec sa jolie décoration qui doit beaucoup au charme de l’Angoumois.
De plan rectangulaire, elle comprend intérieurement trois travées de dimensions égales. D’élégantes colonnes allègent l’austérité de la voûte. Pas d’ouverture dans la nef, la lumière vient surtout du choeur, et un peu de la façade. Ce Choeur prolonge la nef sans aucune altération des dimensions de celle ci et est éclairé, au fond, par le classique triplet, c’est à dire trois fenêtres romanes, hautes et étroites, placées côte à côte, ainsi que par deux fenêtres latérales. Le rythme et l’ornementation de la façade ont beaucoup de charme. Le portail à trois voussures est surmonté d’une archivolte en forme de tresse qui retombe sur des colonnettes. Le sculpteur, non content d’ouvrager artistement les chapiteaux, a orné des colonnettes dont les fûts sont entourés de cercles ou annelés sur toute leur hauteur. Au dessus du portail, des cordons, dont l’un repose sur des modillons sculptés, allègent une façade au centre de laquelle s’ouvre une fenêtre. Celle ci est joliment ouvragée, entourée d’un galon mouluré et encadrée de colonnettes. La façade se terminera par un clocher-arcade à une seule baie qui domine le pignon mais surtout, avant, se conclut en surélévation par une bande transversale en corniche supportée par des consoles ornées de marmousets dont l’un représente une tête de félin.
Le fameux félin de Malleyrand... Raminagrobis... Le Belzébuth du Capitaine Fracasse... le modèle du masque de Jean Marais dans la Belle et la Bête... Bagheera la panthère... L’imagination peut travailler...
La seule chose dont on est sur c’est que le chat modèle du marmouset venait d’un hameau de la Commune. Il venait de Miaulant ! (5)
Voilà chères Églises et chers Saints Patrons. Avec Taponnat et Fleurignac, Saint Rémy et Saint Martial, nous avons terminé notre circuit des Saints Associés et des Églises groupées ! Je propose, pour fêter cela, de nous retrouver tous les neuf dans un mois pour la Vendange à Miaulant justement, dont le vin est renommé. Nous pourrons convier nos bons pères du Doyenné à boire à la santé de toutes nos églises. Je pense qu’ils seront tous d’accord car, à ma connaissance, il n’y a pas, parmi eux, un seul prêtre abstême ! (6)
Sylvain Deschamps.
(1) Voir Tardoire et Bandiat n°137
(2) Voir Tardoire et Bandiat n°152
(3) Les Églises de Charente par Jean George
(4) Extrait des Tontons Flingueurs
(5) L’inévitable jeu de mots
(6) Dictionnaire !
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