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Toutes les présentations des églises ont été écrites pour le journal du Doyenné Tardoire et Bandiat, entre octobre 2001 et août 2005, par Monsieur Sylvain Deschamps.
L'église a été rénovée depuis et ré-ouverte au public le 30 août 2010. Vous trouverez en fin de page quelques photos actuelles.

L’église Saint Germain de Montbron
Saint Germain l’Auxerrois, bien sûr !

clocher de l'église de Saint Germain de Montbron

I - PRESENTATION DE LA JOURNEE par le chroniqueur.
J’ai voulu, par ce joli et chaud matin du mois d’Août reprendre le chemin qu’à la même époque, en 1849, Fanny Ordonneau, veuve Deguissal, avait emprunté pour aller se mettre au service du Curé Gothland, curé de Saint Germain, amant de Mme Dussablons, sans penser qu’un peu plus tard, ces deux derniers allaient s’arranger pour l’assassiner, créant ainsi un des faits divers les plus retentissants de l’histoire de la région (1). Je suis donc parti de l’emplacement de la malle poste à Marthon La Brande et cette petite promenade me permit de réfléchir un peu. Du reste les trajets ne manquent pas, chargés d’histoire ou de paysages.
Au logis de La Brande déjà, à l’intérieur duquel se termina tragiquement le duel à sens unique opposant Claude Roux, juge de Pranzac, la victime à François Viaud, sieur de Charbonnière qui avait oublié les édits de Richelieu contre les duels. J’aurais pu aussi prendre la coulée du pays d’Oc (plutôt pour les cyclistes) ou faire une halte au Moulin de la Chaume. Tout cela conduit à Saint Germain de Montbron… Joli nom qui nous rappelle que Saint Germain est toujours précisé, soit par l’Auxerrois, soit par la localité. On trouve des Saint Pierre, Saint Paul tout court, et toujours des Saint Germain de… Depuis 1849, beaucoup d’eau ( les bonnes années !) a coulé sous les ponts du Bandiat, mais s’il n’y a plus d’après à Saint Germain des Près, il y a toujours beaucoup de présent à Saint Germain de Montbron ! Cette église, et son village, sont incontournables et font partie de tous les rallyes, comme le Saint Antoine de Saint Sornin, le retable de Rouzède, le chat de Malleyrand…
Mes rêveries d’un promeneur solitaire vont bientôt me conduire au pied du clocher… Une odeur inhabituelle de tabac, qui reste cultivé par ici, me rappelle l’arôme corsé des cigares toscans que nous fumions récemment à Rivières, Saint Cybard et moi. D’autre part, le soleil, et la chaleur me font rêver à un frais pichet d’Auxerrois ! (2)
Mais me voici arrivé à la porte du monument, où je suis accueilli par l’église hôtesse, petite personne toute ronde et toute souriante, en fait très couleur locale. Je m’agenouille devant Saint Germain qui grand Seigneur me fait relever et m’invite à m’asseoir à son côté.
II - PRESENTATION DE SAINT GERMAIN.
Cher Saint Germain, en domaine de Sainteté vous êtes ce que l’on appelle une pointure. Votre église de Paris devient paroisse royale à partir des Valois ; et ce côté royal perdure aujourd’hui, puisque c’est chez vous qu’on célébre la messe anniversaire de la mort du roi Louis XVI et autres grandes cérémonies. Pour instruire nos lecteurs je parlerai donc de vous à la 3ème personne.
Votre vie a été écrite, 30 ans après votre mort, par le prêtre Constance de Lyon, pratiquement un contemporain et c’est cette proximité dans le temps qui nous permet d’avoir, pour une fois, une bonne documentation.
Saint Germain est né en 378, près d’Auxerre. Ses parents Rusticus et Germanilla faisaient partie d’une aristocratie gallo romaine riche et instruite. Il reçoit donc une parfaite éducation en Gaule et à Rome où il devient avocat avant de revenir à Auxerre en notable éclairé. Ce qui fait qu’un peu contre son gré, il se retrouve évêque de la ville en 418. Si l’on peut dire, la fonction crée l’organe et il devient un évêque formidable. Les miracles, petits et grands se succèdent. Son temps se passait entre la cathédrale, à l’intérieur des murs de la ville, et le monastère de Saint Côme et Damien, qu’il fait ériger sur l’autre rive de l’Yonne. Alors que Saint Germain et le jeune Loup de Troyes allaient soutenir les évêques de Bretagne menacés par Pélage, hérétique de grand renom hélas, ils rencontrèrent à Nanterre une petite jeune fille, Geneviève, qu’ils dirigèrent dans la voie de la sainteté. Elle deviendra plus tard Sainte Geneviève, la patronne de Paris ! Après avoir éliminé verbalement les Pélagiques ils durent également lutter victorieusement contre les Pictes et les Saxons, donnant ainsi une grande impulsion à la religion chrétienne. Commence alors une formidable période de navettes incessantes où l’on voit Saint Germain se déplacer sans cesse pour accomplir son devoir : « intercéder pour les âmes auprès du juge céleste, pour les corps, auprès du juge terrestre ». Vaste programme qui le conduit à Lyon, à Arles, en Grande Bretagne, en Armorique, à Alésia, à Milan, à Ravenne enfin où il apportera sa force tranquille et quelques miracles à l’appui. Il y resta pour soutenir l’impératrice Placidia et y mourir enfin le 31 Juillet 448 non sans avoir demandé, et obtenu, que l’on rapportât son cœur à Auxerre. Bel exemple de fidélité qui explique sans doute que son culte a été très répandu en France et en Angleterre !!
- Cher Saint Germain, ai je bien résumé votre existence ?

Saint Germain : Très bien et vous avez bien fait de « faire court » sur les détails de ma vie à mon retour de Bretagne, car elle fut tellement riche que je m’y pers parfois !
Façade de l'église de Saint Germain de Montbron Le Chroniqueur : Et maintenant parlons de votre église (je me permettrais de dire : de Notre église ).
III - ETUDE OBJECTIVE DE L’EGLISE SAINT GERMAIN DE MONTBRON.
C’est une église où l’on remarque deux périodes de construction : le 12ème siècle, essentiellement le coté Sud, et le 15ème siècle, essentiellement le coté Nord. Le clocher, un des plus beaux de la vallée du Bandiat ( qui en compte beaucoup) a des motifs à damiers. Sur la façade, une croix qui fait penser aux Templiers. Au dessus du portail, une sculpture représentant la tête de Saint Georges, saint patron des Anglais. L’église était dédiée à Saint Georges jusqu’à la Révolution, avant de devenir l’église Saint Germain. Encore une fois nous ne saurons pas la raison de ce changement, et ce n’est pas le sourire ironico-mystérieux de Saint Germain, devant nous qui nous apportera des éclaircissements !!
La nef compte trois travées séparées par des colonnes sur dosserets, ceux-ci recevant les arcades aveugles des murs latéraux. Seule la travée ouest a conservé son berceau en plein cintre, avec son doubleau et un arc contre la façade sur piédroits ; les autres sont recouvertes en bois. Le faux carré est surmonté d’une coupole sur pendentifs, s’insérant dans les rouleaux voisins des grands arcs, qui gardent leurs faces verticales. Ces arcs, en demi-cercle, à deux voussures, sont reçus par des colonnes sur dosserets. Au nord de ces deux parties, s’étend un bas-côté du XV ème siècle, de quatre travées, communiquant par quatre arcades et couvert d’une voûte sur croisées d’ogives avec lierne centrale et doubleaux, reçus par des consoles. L’abside, plus étroite, ouvre sous un arc porté par deux colonnes. Les chapiteaux ont un décor dérivé de la feuille d’eau, ce qui date l’église du troisième tiers du XII ème siècle. On trouve une fenêtre simple dans la nef, une dans le carré et deux dans l’abside, d’où part la cage de l’escalier.

La façade, remaniée, a une porte à trois voussures sur colonnes et une fenêtre sous un pignon obtus. De longs contreforts sont montés sur la nef et sur l’abside, de plus petits sur le collatéral. Un clocher carré s’élève au-dessus de la coupole. Chacune de ses faces est décorée sur la souche d’une arcade aveugle ; à l’étage intermédiaire, d’une arcature sur pilastres ; à l’étage supérieur retraité au-dessus d’un cordon de quatre baies groupées deux par deux sous des arcs de décharge.
Intérieur de l'église de Saint Germain de Montbron Le Chroniqueur : Alors, Cher Saint Germain, et vous, chère église hôtesse êtes-vous satisfaits ?
L’église hôtesse : Bof !
Saint Germain : Pas du tout !
Le Chroniqueur : Comment cela ?
Saint Germain : Ne faites pas l’innocent ! Mes collègues, Saints divers sont habitués à une note personnelle, de votre part. Alors, j’attends la suite.
L’église hôtesse : Oh oui ! S’il vous plait, une visite affective.
Le Chroniqueur (très flatté) : Alors, allons y pour…
IV - UNE VISITE SUBJECTIVE DE L’EGLISE.
C’est vrai que j’aime beaucoup cette église…
D’abord, sa situation, à mi pente… On la voit de partout, mais elle ne vous domine pas de partout. Et, tenez, ce formidable clocher, qui capte si bien la lumière, il faudrait un Claude Monet pour le peindre aux différentes heures de la journée. Et le meilleur endroit pour le voir, le ressentir, c’est la place devant la Mairie où il est là, devant votre nez… C’est à partir de cette Mairie amie (où il me semble vous avoir déjà vue, chère église hôtesse…) qu’on a la meilleure vue d’ensemble. Et puis, dans l’église, où s’installer ? Au fond, dans le fond ! Au fond à droite, côté 12ème ou au fond à gauche, côté 15ème. Avec ces deux nefs on peut voir sans être vu, et vice versa ! Normalement on n’est pas dans une église pour jouer à ces jeux là. Mais à Saint Germain c’est différent. C’est une église à cache cache. Ne soyons pas irrespectueux… mais si l’on « virait » tous ces bancs et chaises dépareillés, et en demandant pardon aux civils enterrés sous l’église à gauche et aux religieux enterrés à droite, on libérerait un formidable parcours pour jouer à la marelle sur ces superbes dalles ! Et je vois bien le tendre Marcel Aymé, dans ses Contes du Chat perché inviter Delphine et Marinette à pousser le palet sur les dalles. Le dessin de la marelle y est déjà tracé, avec un piège évident car, comme dans beaucoup d’églises bien nées, celle ci est légèrement en pente. Et pourquoi pas « pigeon vole » dans cette église à la fois très vieille, très jeune et surtout très fraîche… fraîche d’esprit et fraîche de cœur…
Autel de l'église de Saint Germain de Montbron Et puis c’est une église pleine de gris-gris, d’inscriptions mystérieuses, de points d’interrogations ? Je sais que c’est à la mode actuellement de rechercher des « codes » partout, mais à quoi correspondent ces pointillés de peinture côté gauche, et cette si petite porte pour monter au clocher, si étroite, qui laissait-elle passer : des pages, des enfants de chœurs ou des moinillons ?
Bien sur, tout n’est pas de la même qualité… et si l’on peut sourire avec tendresse devant des petits vases avec bouquets à la mexicaine, on peut s’agacer devant certains lustres en cuivre repoussé-repoussant.
On n’est même pas obligé de dithyrambiquer le fameux retable qui souffre vraiment de son emplacement pas plus que le chemin de croix qui n’arrive pas à être vraiment naïf… Mais le même Deschamps du chemin de croix a réussi un bijou avec son grand tableau : Cette représentation du grand Saint, aux cotés de l’abbé Rossignol et devant les habitants de la paroisse me ravit par la pureté du dessin et surtout par le naturel de tous ces gens qui trouvent normal de se trouver tous réunis, sans compter les petits tableautins du dessous qui rejoignent la première campagne en commun de vous, Saint Germain et de votre associé de l’époque, le jeune Loup de Troyes. Tout cela est cohérent. La boucle est bouclée.
Et puis, puisqu’en église, tout se termine comme tout commence, c’est à dire par la beauté, et qu’ici comme ailleurs, Jésus est super-star signalons les 3 statues-bijoux : à droite en entrant le Christ Sacré Cœur particulièrement lumineux, sur le Maître autel un petit Christ très émouvant et sur le mur, face au Sacré Cœur, une admirable statue, en bois, du Christ avec un visage à convertir, à convertir, à convertir…
Voilà, cher Saint Germain et chère église ma façon un peu iconoclaste de vous rendre hommage, mais c’est, avec votre respect, un chemin qui tient sa route…
L’église, toute contente : Je l’ai eu, mon article !
Saint Germain, souriant : Votre cas n’est pas désespéré, mais la route sera longue !
Le Chroniqueur : Merci de m’appuyer… là haut ! Et, pourquoi pas, dans votre église royale à Paris, une messe, même petite, pour les 210 ans de la mort de l’enfant martyr ?

Sylvain Deschamps

(1) Lire « L’affaire du Curé Gothland » de Marie Bernadette Dupuy aux éditions le Soleil de Minuit. On peut aussi, et pour le plaisir lire les chroniques touristiques qu’elle consacre à la Charente dans la collection Découverte.
(2) L’Auxerrois est un cépage d’Alsace, très proche du pinot blanc qui donne un vin très sec et très fruité qui avait été très apprécié par Bossuet (noble référence). Guide du Vin par Raymond Dumay. LDP p.101.

Autel de l'église de Saint Germain de Montbron Autel de l'église de Saint Germain de Montbron


Carte de la paroisse Saint Augustin en Tardoire et Bandiat

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